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Here, there, everywhere

mardi 14 septembre 2010, par Sébastien Bourdon

Ce week-end, une festivité amicale m’a envoyé vers une terre inconnue, la côte basque. Au-delà du plaisir de passer du temps avec des gens merveilleux (car oui, j’ai des amis merveilleux), j’ai définitivement acquis la conviction qu’être pieds nus dans le sable le week-end, c’est finalement assez précieux et pas forcément assez fréquent.

Si le ciel semble incertain aux alentours de Biarritz - c’est très vert ce coin, quand on a passé beaucoup d’étés en Normandie, c’est une couleur qui ne trompe pas sur la pluviométrie – le soleil fut majoritairement présent et il est bon à l’approche de la quarantaine de rigoler encore avec les amis dans les vagues.

Le dimanche, attablés en nombre dans un bistro de plage, nous en sommes venus à aborder cette épineuse question : la « qualité de vie ». Peut-être pourrions nous être mieux ici, ou ailleurs ? Certains d’entre nous s’étaient vus aborder dans le week-end par des gens très étranges qui vivent bien au-delà du périphérique et qui, bizarrement, en viennent très vite à parler de la vie formidable qu’est la leur, à Bordeaux ou Lyon. Il nous est alors apparu que le provincial se sent spontanément obligé de justifier la valeur intrinsèquement supérieure de son existence, du seul fait de sa localisation géographique. Un parisien (au sens large), jamais. On pourrait disserter des heures sur ce thème, mille explications ou contestations sont possibles.

Avec la mer en unique point de vue, on sent évidemment que l’argument est très défendable (ça marche aussi avec la montagne). De là, nous en sommes venus à évoquer les dimanches en province, les distances qui vous obligent à la voiture, le fonctionnement en cercles sociaux immuables etc. Là encore, nous en sommes sortis sans solutions, pas forcément convaincus de la réalité de notre mixité quotidienne et de ce que le slalom entre les crottes de chiens et les rames de métro bondées soit plus défendables.

Mais, en ce qui me concerne, c’est Paris (ou Montréal, ou Berlin, ou Madrid… ce genre) ou la jungle (ou les Bijagos, la steppe mongole, que sais-je encore). La province, c’est la demi-mesure et puis la capitale, c’est chez moi. D’ailleurs, je vis à Saint-Ouen.

Le même jour, Claude Chabrol disparaissait. Pour ce qui est de la description de la province française, c’est sans doute le seul à y être parvenu au cinéma avec une acuité similaire aux auteurs du XIXème siècle. Je replonge régulièrement dans «  les mémoires d’un touriste » de Stendhal, et en fait, en France, rien n’a changé. De cette acide constatation, Chabrol a fait une œuvre et son adaptation du chef d’œuvre de Flaubert, Madame Bovary, illustre bien cette parenté.

Si on devait me demander ce que j’aime dans ce pays, je parlerai notamment de types comme lui. La drôlerie et l’appétit, jamais éteints par un regard terriblement lucide sur la médiocrité humaine et notamment bourgeoise. Cela a pu donner des films parfois drôles (Poulet au vinaigre) mais également glaçants (La femme infidèle), mais surtout cela donne un ensemble cohérent et un parcours artistique passionnant.

S’il croise Truffaut là-haut, qu’il pense à l’embrasser pour moi.

Sébastien Bourdon