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Gâteau de Noël

jeudi 11 décembre 2008, par Sébastien Bourdon

Le nouvel album de Guns n’ Roses semble avoir beaucoup plu a notre ami Seb. Commentaires :

18 juin 1991 : je suis à la FNAC Wagram (aujourd’hui disparue) et y achète « Appetite For Destruction » des Guns n’ Roses. Je me rends ensuite au 62, rue de Rome, vers la 1ère chaîne stéréo utile, plus précisément dans la chambre de ma cousine Clémence et y écoute ladite galette. Axl me dit : « Welcome to the jungle ».

6 juin 1992. J’y étais. Hippodrome de Longchamp. « Axl, Axl, Axl... » scande la foule. Ledit Axl (W. Axl Rose, comprendre W.A.R.) est là, bandana - tee-shirt résille - jupe en cuir, fumant langoureusement, comme absent à la foule et à lui-même. Il sourit doucement, comme conscient de sa surpuissance. Il balance sa clope et chante a cappella une histoire d’amour vénéneuse, s’interrompant parfois pour recueillir les cris de la foule. Puis Slash entame « Sweet Child O’ Mine ». Et tout le monde s’envole.

16 ans plus tard, j’y suis toujours, les bras chargés de sweet children à moi, attendant finalement impatiemment la livraison d’un disque (« Chinese Democracy », disque le plus retardé et le plus cher de l’histoire du disque) auquel je ne croyais plus. Le disque s’ouvre par des bruits lointains de conversation, des nappes de synthétiseur, une guitare cristalline, des percussions et enfin, sur des accords tendus de guitares saturées, le cri d’Axl qui monte. Puis il chante que tout cela n’a pas d’importance, qu’on s’en rendra bien compte nous-mêmes.

Et chaque écoute (tous les jours ou presque, like a drug) me rend l’évidence plus palpable, Axl est de retour. La plus grande rock-star de cette génération (il a 46 ans), la dernière peut-être, avec tout ce qu’il faut comme charisme brutal, nihilisme et panache (comprendre absence totale de peur du ridicule). C’est comme un mort qui surgirait des limbes, foutrement vivant. 2008, la voix de l’Amérique revient définitivement à nos oreilles.

Je ne tergiverserai pas une seconde, ce disque « Chinese Democracy » est un chef d’œuvre, il s’agit de la galette la plus monumentale depuis... je ne sais pas moi, chacun trouvera un disque, ça fera un jeu.

De quoi parle-t-on ? D’art.

Ce n’est pas un disque, c’est une trajectoire, un geste d’autant plus insensé qu’il est accompli dans un monde qui n’est déjà plus celui où il a été commencé. Cela n’a aucun sens de dépenser des millions de dollars pour un album, qui attend encore un « Physical Graffiti » ? Comprenons-nous bien, à quoi bon réaliser le disque le plus cher de l’histoire quand dehors, s’en rend-il même compte Axl, tout le monde s’en fout, trouvant matière suffisante dans les litres d’eau tiède sur Myspace et Deezer.

Ce qui nous ramène au personnage. Revoyez des images de lui, même tout jeune, il a une assurance tout simplement démente. Qu’il se retrouve à Wembley avec Elton John ou à Longchamp avec Aerosmith, il les regarde en n’imaginant même pas une seconde que ces légendes vivantes vont prendre plus de place que lui sur scène. Axl Rose s’en fout, il fait ce qu’il veut. Il est un jour descendu dans le public pour aller taper un spectateur. Plus fort, en 1992, il a quitté la scène à Montréal déclenchant une émeute non pas seulement dans le stade mais dans toute la ville. Pareil pour ce foutu disque : ça coûtera des millions (dix-sept selon les gazettes, finalement pas grand-chose si l’on compare avec le coût d’une banque pour le contribuable occidental), et alors ? Treize ans à attendre s’il le faut, allez vas-y ça porte bonheur. Il a remis cent fois sur le métier le projet, virant musiciens et producteurs avec une régularité métronomique, ce qui donne par exemple cet incroyable empilement de guitares (jusqu’à cinq guitaristes différents par morceau !).

Tout cela force le respect. On parle choix et orientation artistiques. Ce type, alors au faîte de sa gloire, s’est enfermé chez lui pendant près de 15 ans, pour faire le disque dont il avait envie. Persistant d’ailleurs dans son attitude, cela fait deux mois que le garçon a disparu et qu’il n’assure strictement aucune promotion pour ce disque (qui se vend d’ailleurs assez mal aux Etats-Unis).

Il est effectivement très probable qu’il ne soit même pas satisfait de son travail et qu’il a voulu s’épargner la promo à l’américaine (farcissez-vous un jour un bonus de DVD américain récent : « le réalisateur était super, les acteurs étaient supers, le film est fabuleux, jamais aussi bien mangé que pendant ce tournage à la Barbade... » Blablabla jusqu’à l’écœurement).

Alors le disque maintenant, tous les jours. Et je vous le dis, il n’y a pas un mauvais morceau dans cet album. On pourrait discuter arrangements, production,... tout ce que vous voulez, mais l’essentiel est là : une démarche artistique et des compositions en or massif (il est ainsi inutile de tenter de résister à « Better »). Le tout porté par cette foutue voix. Ses anciens camarades de jeu ont entre temps pondu quelques honnêtes galettes de rock n’ roll avec Velvet Revolver, mais ça n’arrive pas à la cheville de ce projet dément.

Quant aux détracteurs, Axl les a de toute façon prévenus « I’m sorry for you, not sorry for me ».

Seb

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